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L'irradié

from Mouche by Mouche

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lyrics

Je vis dehors, loin des bulles protectrices,
Ma gueule est recouverte d'énormes cicatrices
Dues aux caprices d'une nature incomprise
Piétinée, quasi-ratatinée
Par les anciens qui se sont obstinés
A vouloir la redessiner, quitte à la décimer...
Je vois des silhouettes grassouillettes qui se meuvent
Dans ces miroirs aux alouettes, qu'il vente, qu'il pleuve
De l'acide sulfurique leur importe peu
Car les intempéries rebondissent sur eux.
Moi, je vois tout, je sens tout, j'entends tout,
Tantôt le bruit du vent, tantôt mes quintes de toux
Qui me rappellent que je n'ai plus droit de séjour
Dans ces énormes bulles qui m'entourent.
Je suis sauvage, comme on dit,
Je n'ai pas accès à ces villes arrondies
Où tout est propre comme les fesses rebondies
D'un bébé qu'on aurait trop bien nourri.
Je mange des cadavres d'animaux un peu pourris
Et les quelques végétaux qui percent encore
La surface décharnée, le sol presque mort
De cette planète sur laquelle on s'est acharné.

Je ne crois pas vous avoir dit que j'étais irradié,
Vous deviez vous en douter, j'imagine,
Je suis né dans une grosse machine :
Une énorme couveuse à bébé.
Mon père était une goutte de sperme radioactif
Et ma mère un simple ovule artificiel
Et moi, je vous le dis à titre informatif,
J'étais destiné à vider les poubelles.
J'étais homme-ordure, c'était ma caste officiel.
C'est classe, non? Aujourd'hui je ne suis plus rien
Et c'est tant mieux, ça vaut mieux que pas grand chose,
Au moins, je suis libre, maître de mon destin
Mais toujours esclave de la prochaine dose
De médocs qui calmera ma douleur,
Les radiations rongent tout mon intérieur,
Sur mes pauvres poumons, la poussière se pose.
Avant, quand je vivais en ville,
C'était sain, c'était soft, c'était si soyeux
Que toute révolte nous paraissait inutile,
Que même triste, on se sentait joyeux,
Endormis par la musique des centres commerciaux,
Elevés aux écrans dès le berceau...

Loin des bulles, c'est la vie qui déboule,
C'est là que je déballe mes tripes, que l'temps s'écoule
Au rythme de ce qui reste de saisons,
Et ici, au moins, on voit bien l'horizon...
De toute façon, je n'ai pas vraiment d'autre choix,
Les irradiés sont les barbares d'autrefois,
Interdits en ville, suppression d'état civil,
Pas d'âme selon l'église, réputés indociles,
Les irradiés sont radiés du statut d'humanité,
Les irradiés sont châtiés pour l'éternité.
En général, ici, on ne vit pas très vieux,
Du coup, on ne prend pas la vit trop au sérieux,
J'ai vingt ans, encore une dizaine à respirer
Et ma date de péremption aura expiré.
En attendant, je visite le monde et j'apprends
Chaque jour un peu plus sur l'époque d'antan,
J'observe les vestiges, ça me donne le vertige,
Ils sont comme autrefois mais dépourvus de prestige,
Guère plus civilisés que des totems d'adoration,
Ils ont juste déifié l'argent et la nation.
A l'extérieur des bulles, la thune n'existe pas,
Le troc est revenu, on échange n'importe quoi,
Sur le sol brillent toutes les choses d'autrefois,
Il n'y a qu'à se baisser, rien qu'à tendre les bras.
On trouve de tout ici, on se demande souvent
A quoi servaient ces trucs dans le monde d'avant :
Des carcasses métalliques qui émergent du sable,
Des fils, des câbles, des liquides irrespirables,
De l'acier, de l'argent, tout un tas de métaux,
Des immenses restes de stations de métro,
Dehors, c'est l'apocalypse mais y'a une chouette ambiance rétro,
Seule consolation de ceux qui restent sur le carreau.
Enfermés sans barreaux, on joue nos vies au tarot,
Le garrot se resserre autour de nos gorges irritées,
Abîmés par l'air impur comme nos esprits immoraux,
La morale est un luxe dont nous n'avons pas hérité.

J'ai des tonnes de bouquins dans mon vieux sac à dos,
Pendant mes heures de répit, je décrypte leurs mots,
En les associant au réel, je comprends pas mal de choses :
Camps de concentration, génocide, kolkhozes
Sont des mots de l'ancien temps mais conviennent parfaitement
A ce que mes congénères et moi vivons concrètement.

Je suis assis, immobile, sur une vieille automobile
Avec du papier jauni et un vieux stylo bille,
Je décris ce que je vois à quelques lieues de la ville,
de ce gros globe qui brille dans la nature hostile.
Mon ancien monde était semblable à celui-là,
A des milliers de lieues mais ils sont tous pareils,
En tout cas, je suis sûr que je n'y retournerai pas,
Même s'ils sont meurtriers, j'aime les rayons du soleil.

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from Mouche, released April 17, 2015

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Mouche Lille, France

Le projet « Mouche » est né d'une envie de mettre en mots et en musique les errements de la société post-industrielle ainsi que les bouleversements récents de la vie humaine à travers les profondes mutations technologiques et philosophiques du monde moderne. ... more

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